Art. 10a – Maria (première partie)

(Tous les mots suivis d’un * sont expliqués dans le glossaire figurant au bas de l’article)

Au départ, elle n’avait pas de nom… IRMA(*) et JOSE(*) à sa suite venaient de passer au nord de l’arc antillais. J’avais encore cette boule au ventre que j’ai conservé pendant une semaine à voir les dégâts provoqués par la première, un cyclone majeur classé catégorie 5 sur l’échelle de Saffir-Simpson qui ne compte que 5 graduations quand celui-ci aurait mérité de se voir affecter une catégorie supérieure d’après les dires de certains. Encore que… passé le stade 5, de toute manière, le résultat est le même : une dévastation totale des zones traversées par ce phénomène… Alors que les vents fassent 250 km/heure (seuil bas du classement en catégorie 5) ou 360 km/heure (rafales mesurées à St-Martin(*)), ça ne fait plus réellement de différence…

En Martinique, nous venions d’être avertis de l’apparition de deux nouvelles perturbations sorties d’Afrique. « Perturbations », c’est le nom qu’on donne à ces phénomènes météorologiques qui entraînent une dégradation du temps pouvant engendrer du très mauvais temps. Rapidement, l’une d’elle s’est transformée en tempête tropicale et s’est vue affecter un nom et des trajectoires possibles ont été calculées par les différents modèles existants (GFS(*), ECMWF(*) et Arpège(*)). Aucun danger pour l’arc antillais. L’autre, par contre, continuait à avancer vers nous sans se « transformer » et semblait viser la Martinique. Tous, anxieux, nous avons suivi tous les jours la mise à jour des informations la concernant. Trois jours avant de toucher l’arc antillais, aucun modèle n’était encore en accord avec l’autre. La « perturbation » semblait ne pas vouloir afficher clairement ses intentions…

Je m’étais déjà faite une petite frayeur avec le passage de l’ouragan IRMA pour lequel tous les modèles prévoyaient une trajectoire d’abord en ligne droite sur la Martinique avec un infléchissement marqué plus au nord quelques jours seulement avant qu’elle ne touche les îles des Caraïbes. Jusqu’à ce que je vois cet infléchissement prévu se refléter sur les images satellites, j’avais eu le temps de me dire que si j’avais choisi la mauvaise option – celle de rester dans la Marina du Marin en Martinique – au lieu de me déplacer plus au sud, il était maintenant trop tard pour faire quoi que ce soit. Houle trop forte, rafales de vent, je n’aurais plus eu qu’à accepter les conséquences de mon choix… Heureusement, tout s’était bien passé pour nous en Martinique au contraire des îles plus au nord comme celles notamment de Saint-Martin(*) ou de Barbuda(*). Et à la vue des monstrueux dégâts engendrés par le monstre IRMA, je me suis dis que jamais plus, si je pouvais l’éviter, je ne resterai dans une zone menacée. C’est ainsi qu’à peine une semaine après le passage d’IRMA et de JOSE, j’étais, de nouveau, à suivre fébrilement l’évolution d’un nouveau phénomène potentiellement cyclonique…

J-4… Chacun à la Marina y va de son pronostic : « Elle va monter au Nord, t’inquiète pas », « Va à la marina de Ste Lucie(*), ça suffit » (c’est l’île au sud de la Martinique à environ 20 milles nautiques), « Ne bouge pas de ton corps mort(*) au Marin, il est solide », « Met ton bateau dans la mangrove(*) » (l’attacher aux palétuviers qui bordent les « trous à cyclone »(*) du Marin)… Certains de mes amis toutefois se préparent à bouger plus au sud avec leur bateau. Le mien est prêt. Il ne me reste qu’à me décider.

J-3… Nous sommes samedi 16 septembre 2017. J’ai deux amis qui déplacent leur bateau. Pierre a décidé de partir mettre son catamaran à l’abri à Bequia(*) à environ 100 milles d’ici. Jean-Phi, lui, part également au sud. Son voilier est à l’heure actuelle dans la baie de Saint-Anne à la sortie du Marin. Son moteur ne fonctionne pas et il sait que son mouillage risque de ne pas résister à la forte houle attendue… Il est 10h du matin et j’hésite encore. J’y vais, j’y vais pas ? J’y vais ? Allez, je fonce ! Après tout, ça me fera naviguer, ce n’est pas plus mal.

Pierre et son équipage prévoient de s’arrêter à l’« Anse Cochon » sur l’île de Ste Lucie le samedi soir et de rejoindre Bequia le dimanche. Pourquoi ne pas suivre leur trajet et faire la même étape ? Je ne connais pas cette anse, ce sera l’occasion. J’appelle Jean-Phi pour connaître son plan. J’apprends à l’occasion qu’il est à terre à la marina du Marin, pas loin de moi, et qu’il cherche le moyen de rejoindre son bateau. Ni une, ni deux, je lui propose de le déposer. Il me rejoint et m’aide à finir de préparer le bateau. Et hop, on remonte le moteur de l’annexe, puis l’annexe elle-même qui est dégonflée et stockée devant le mat, sanglée comme il le faut. Ça va quand même nettement plus vite à deux ! Je vérifie les niveaux et allume le moteur. Ça y est, c’est parti !!! Il est 13h30.

Premier arrêt, le bateau de Jean-phi à St Anne. Mon voilier est un nain à côté de celui-ci qui est deux fois plus grand ! Le vent qui souffle en rafales fait tourner son acier. Il me faut deux essais pour réussir à rapprocher suffisamment mon voilier du sien et lui permettre d’enjamber les filières pour monter à bord sans se mouiller. Me voici seule à mon bord.

Prochaine étape : Sainte-Lucie ! Je hisse rapidement la grand-voile et déploie mon génois(*). La traversée du canal(*) se déroule sans accroc. Je réalise toutefois en m’approchant de l’île que je suis partie un peu trop tard. Je vais arriver à l’Anse Cochon bien après la nuit et ça m’ennuie car je ne connais pas les lieux. En plus, la cartographie indique qu’il y a une épave à l’entrée. C’est chaud quand même d’y entrer sans avoir repérer les lieux avant. Et, en plus, il n’y a pas de lune aujourd’hui. Les conditions ne sont pas au top quand même…

Je réfléchis un instant à m’arrêter à la première baie facilement accessible à Ste Lucie, Marigot Bay que je connais bien, bien avant l’Anse Cochon, mais la distance que je n’aurais pas parcourue ce soir, c’est autant à parcourir demain et la route est encore longue. MARIA – la perturbation a enfin un nom car elle s’est transformée en tempête tropicale – arrive lundi soir sur l’arc et je ne peux pas me permettre de traîner en route. D’autant plus qu’il s’agirait alors d’un cyclone de catégorie 1 voire 2…

Je dépasse donc Marigot Bay. La nuit tombe. Je passe à distance de l’Anse Cochon vers 21h. Je tente un timide appel VHF à destination de Pierre qui devrait déjà y être depuis longtemps. Pas de réponse. Mon téléphone, quant à lui, ne capte aucun réseau… Je me sens un peu esseulée subitement, toute seule là dans le noir… Jean-Phi est censé n’être pas très loin derrière moi – il m’a envoyé un SMS me disant qu’il était parti environ 1 heure après que je l’ai déposé – mais je n’arrive pas non plus à le contacter. Et j’ai beau tenter de repérer ses feux de route au loin, je ne vois rien…

Je m’interroge… Un marin averti n’hésiterait pas et continuerait à naviguer de nuit. Moi, je n’ai encore jamais enchaîné 24h de navigation non stop. Ma plus longue traversée en solo, c’est 17 heures jusqu’à présent. J’étais partie très tôt le matin, avant la levée du jour et j’étais arrivée à la nuit tombée. Mais je n’ai encore jamais navigué seule une nuit complète… En équipage, ça passe… Mais seule, c’est une idée qui m’angoisse un peu, j’avoue. La nuit, tout me semble plus menaçant. Privée d’une vision parfaite, mon imagination s’emballe. Un peu comme les gosses qui ont peur du monstre caché sous leur lit. J’avoue me sentir un peu démunie là toute seule dans le noir. Pas un bateau « ami » visible à l’horizon… Malgré l’absence de lune, je vois toutefois un ciel dégagé, décoré d’étoiles. Je décide de me lancer. Après tout, pourquoi ça se passerait mal ?

Je continue donc ma route. Le vent diminue. Tant mieux car j’aimerais traverser le canal séparant Ste Lucie de St Vincent de jour si possible et une réduction de mon allure va dans le bon sens sinon je vais entamer le canal dans l’obscurité la plus complète. Il semble que ma prière ait été entendue… un peu trop d’ailleurs… Plus de vent ou à peine… Les voiles claquent… Mais un petit courant favorable me permet tout de même de faire du 1 noeud, 1,5 noeud…

Je fais des micro-siestes de 5 ou 10 minutes. Dès que j’ouvre les yeux, je vérifie ma position car je ne suis pas si loin de la côte, je reste à l’affût de potentiels obstacles ou de bateaux que je pourrais croiser sur ma route. Je ferme à nouveau les yeux quand j’entends un gros souffle non loin de moi, une sorte de forte expiration qui me fait sursauter. Il fait trop sombre pour voir quoi que ce soit. Je brandis une lampe sur les eaux noires, sans succès. Encore un souffle, sur l’autre bord cette fois, ci. Je devine sans les voir que ce sont des dauphins qui doivent chasser tout près. Ce petit manège dure 2 ou 3 minutes et ensuite, c’est de nouveau le seul bruit des voiles et du bateau qui avance doucement sur l’eau.

A 2 heures du matin, je craque et je mets le moteur pour atteindre une vitesse d’environ 4 noeuds. J’atteins le canal de St Vincent et là, surprise, toujours pas de vent… Sous le vent de l’île, ça ne me paraît pas étonnant mais dans le canal ?!!! Étonnée, je traverse ainsi au moteur ce canal réputé pour être habituellement plus coriace que celui de Ste Lucie…

La levée du jour est magnifique à voir. Je longe maintenant l’île de St Vincent. Le vent est monté un peu pour retomber plus loin. J’essaie de jouer avec les voiles mais le vent est réellement capricieux. De nouveau, j’utilise le moteur pour traverser le canal entre St Vincent et Bequia. Et c’est seulement à 1 ou 2 milles de l’arrivée que le vent se remet à souffler. Trop tard, j’ai déjà rangé ma grand-voile et roulé le génois… Ce sera moteur jusqu’à la fin.

J’entre enfin dans la baie qui m’offrira sa protection pour le passage du cyclone MARIA. Elle est très ouverte et donc, forcément, on ne pourra pas échapper à la houle d’ouest qui est attendu. Pas vraiment idéale l’orientation de cette baie. Je tente de trouver un coin « confortable ». J’analyse tant bien que mal la situation et je décide de me rapprocher du bord pour pouvoir mouiller l’ancre dans 5 mètres maximum (ce sera 25 à 30 mètres de chaîne à remonter à la main déjà… si je vais dans du plus profond, c’est encore plus de chaine à lâcher) et je choisis l’extrémité de la baie la plus éloignée du mouillage principal et des pontons. J’espère être légèrement protégée par le relief de l’île et avoir fait le bon choix. Il est 13h00. Je pose l’ancre et je me glisse dans ma couchette pour faire une longue sieste.

A 17h00, je suis réveillée par des coups frappés sur ma coque. C’est Pierre qui est arrivé entre-temps sur le mouillage. Il a eu le temps de faire une bonne nuit lors de son étape et il est ancré à une centaine de mètres de là, pas loin d’un de ses amis également en catamaran. Il passait juste me faire un coucou et repart rapidement.

J’ai quelques nouvelles de Jean-Phi, il est loin derrière sans moteur pour soutenir son allure. Il prévoit d’arriver au milieu de la nuit. Avant que la nuit tombe, je décide de gonfler mon annexe et de la mettre à l’eau au cas où il aurait besoin d’un coup de main à son arrivée. Poser le moteur dessus n’est pas une mince affaire, ça commence déjà à rouler là où je suis. Je peste, je râle, j’utilise les pieds et les mains pour descendre le moteur à l’aide de mon palan fait maison. Le dinghy(*) saute, bouge, se coince sous le cul de Nautigirl, et moi j’essaie de viser le tableau arrière avec les mâchoires étroites du moteur hors bord qui pèse quand même dans les 30 kilos. Pas facile toute seule ! Mais je finis par remporter la bataille sans rien casser ! J’amarre l’annexe à l’arrière de Nautigirl. Je me fais un peu de souci car je la vois bondir quand même pas mal. J’espère qu’une vague ne viendra pas la renverser. De toute manière, il est trop tard pour y changer quoi que ce soit. J’ai déjà eu du mal à mettre en place l’ensemble, tout désassembler, ça va être la misère toute seule. Et la nuit tombe… On verra bien…

Décidément, ce mouillage est bien pourri… On subit quelques bonnes rafales durant la nuit qui me font sortir d’urgence de la couchette dans laquelle je dors toute habillée pour être prête au cas où, frontale sur le front… Je vérifie que l’ancre tient toujours et que le rivage est toujours à distance. Je ne suis pas rassurée par le bruit de quelques vagues que j’entends déferler… Pas bon, pas bon ! Qu’est ce qu’on voit mal même avec une lampe quand il n’y a pas de lune ! Si ça monte encore, ça va rapidement craindre là où je suis. J’ai du mal à conserver mon équilibre. Je vois que plusieurs de mes voisins sont soucieux eux-aussi, les lumières qui balayent leur pont et l’eau environnante en témoignent.

A 2 heures du matin, Jean-Phi m’envoie un SMS. Il est sous grain, non loin de Bequia et il préfère continuer sa route. La mer lui paraît un meilleur abri qu’un mouillage mal orienté. Et je le comprends, maintenant que je suis dedans… Jamais je n’avais connu de mouillage si agité. Ma seule expérience, c’était le passage d’IRMA bien plus au Nord quand j’étais au corps mort dans la marina du Marin. Je trouvais déjà que Nautigirl jouait au « poney », mais là ce n’est plus du saut d’obstacles, ce sont les montagnes russes !!!

Et la pluie se met de la partie… J’arrive tout de même à dormir un peu entre deux escalades (c’est le bon terme !) sur le dinghy pour le vider entre deux bonnes averses. C’est fou ce qu’un grain peut libérer comme litres d’eau ! Quelques minutes de pluie intense et c’est 10 ou 20 litres d’eau au fond de l’annexe…

Au petit matin, j’escalade une nouvelle fois le dinghy et je m’invite à bord du catamaran de Pierre qui m’offre gentiment le thé. J’apprécie ce petit moment plus au calme. J’ai beau préférer les monocoques, j’avoue qu’un catamaran, c’est pas mal non plus… Là au moins, je peux poser ma tasse sans craindre qu’elle se renverse dans la seconde. Nous nous mettons d’accord pour aller à terre ensemble un peu plus tard pour faire les formalités d’entrée et ensuite, nous déplacerons ensemble mon bateau pour trouver un endroit plus protégé de la houle. Cool !

Je retourne rapidement à mon voilier pour prendre deux ou trois affaires mais ce que je vois me fait changer d’avis. La houle semble encore plus forte là où je suis… ou c’est le fait de sortir d’un catamaran ultra stable qui me donne cette impression… La houle surprend Nautigirl de travers parfois et je la vois giter(*) très très fortement… C’est sûr, la houle a bien forci ! J’ai peur de tomber de l’annexe avant de réussir à monter à bord ou de voir la coque de Nautigirl lui tomber dessus à cause des ruades que je lui vois faire ! J’ai énormément de mal à monter à bord et une fois que c’est fait, j’attache l’annexe à l’arrière, je démarre le moteur et j’appelle Pierre à l’aide.

A SUIVRE…


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A très vite !


PS : Cette histoire raconte ce que j’ai vécu mais afin de respecter l’anonymat des personnes qui ont croisées ma route, j’utilise des prénoms d’emprunt – sauf autorisation expresse obtenue de leur part.


GLOSSAIRE :

AIS (Automatic Identification System) : système d’identification automatique et d’anti-collision qui va envoyer des informations sur la position, le cap et la vitesse d’un bateau équipé de l’appareil.

Annexe : petite embarcation, à rame ou à moteur, permettant de faire les allers retours entre le port ou le rivage et le bateau en mouillage.

Arpège : modèle mathématique de prévision de Météo France.

Baille à mouillage : soute à l’avant du bateau dans laquelle on range la chaîne et parfois l’ancre elle-même.

Barbuda (se dit aussi « Barbude » en français, à ne pas confondre avec « La Barbade ») : île du Nord des Petites Antilles faisant partie du pays Antigua-et-Barbuda. Barbuda se situe au nord de l’île d’Antigua. La population est d’environ 1.600 habitants.

Balcon : structure métallique à l’avant (et parfois à l’arrière) du bateau.

Bequia : île du Sud des Antilles faisant partie de l’état de Saint-Vincent-et-les-Grenadines. Bequia se situe au sud de l’île de Saint-Vincent. C’est la plus grande île des Grenadines. La population est d’environ 6.000 habitants.

Canal : portion de mer entre deux îles.

Chaise (de moteur) : support sur lequel se fixe l’étrier (l’espèce de mâchoire) d’un moteur hors-bord. Il peut être en bois ou en plastique et permet d’entreposer le moteur verticalement, souvent au niveau du balcon arrière d’un voilier.

Chandelier : rien à voir avec une bougie même si ça peut vaguement y ressembler. Ce sont les barres métalliques verticales fixées tout autour du pont et dans lesquelles passent les filières.

Cockpit : emplacement situé à l’arrière d’un bateau de plaisance, où se tient le barreur.

Couple (à) : mettre à couple deux bateaux, cela veut dire les mettre côte à côte.

Corps-mort : objet pesant, comme une dalle de béton par exemple, posé au fond de l’eau et qui est relié par un filin ou une chaîne à une bouée, afin que les bateaux puissent s’y amarrer.

Davier : pièce métallique fixée à l’étrave (l’avant du bateau) et équipée d’un réa (partie mobile qui tourne sur elle-même comme l’intérieur d’une poulie) afin de guider la chaîne du mouillage. L’ancre elle-même vient s’y encastrer une fois remontée.

Dinghy : annexe en anglais. Les deux mots sont couramment employés pour définir la même chose. Voir la définition d’annexe plus haut.

ECMWF (European Centre for Medium-Range Weather Forecasts) : modèle mathématique de prévision météorologique européen.

Enrouleur : dispositif permettant d’enrouler une voile, soit pour en réduire la surface afin de l’adapter à la force du vent, soit pour la ranger complètement enroulée. L’enrouleur de génois ressemble à un long tube allant du pont quasiment au sommet de mat avec une sorte de bobine de corde à sa base (c’est cette corde qui permet d’enrouler ou de dérouler la voile).

Génois : voile d’avant avec un recouvrement important de la grand-voile (i.e, le point d’attache des écoutes est bien en arrière du mât).

GFS (Global Forecast System) : Modèle mathématique de prévision météorologique américain.

Giter : action de s’incliner sur un bord lorsqu’on parle d’un bateau.

Irma : L’ouragan Irma s’est développé du 29 août au 12 septembre 2017. Il est le dixième système tropical de la saison cyclonique 2017 dans l’océan Atlantique nord et le deuxième ouragan majeur, catégorie 5, sur l’échelle de Saffir-Simpson, après l’ouragan Harvey, catégorie 4, survenu une semaine auparavant. Il est un des ouragans les plus puissants enregistré dans l’Atlantique nord depuis Hugo en 1989 et par la vitesse de ses vents soutenus (295 km/h) depuis Allen en 1980. Il est aussi le premier ouragan à rester classé en catégorie 5 pendant une aussi longue période continue. Il a causé des dégâts catastrophiques dans les îles de Barbuda, Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Anguilla et les Iles Vierges, a éprouvé sévèrement la côte nord de Cuba et a obligé la Floride à mettre en place une évacuation de plus de six millions d’habitants.

José : L’ouragan Jose est le onzième système tropical et le troisième ouragan majeur de la saison cyclonique 2017 dans l’océan Atlantique nord. Formé dans la traîné de l’ouragan Irma, à partir d’une onde tropicale sortie de la côte africaine, il s’est intensifié rapidement en arrivant près des Petites Antilles. Menaçant de se propager le long de la même trajectoire que son prédécesseur, Jose a soudainement viré vers le nord et a erré plusieurs jours entre les Bahamas et les Bermudes avant de remonter lentement vers le nord en faisant une courbe entre la côte est des États-Unis et les Bermudes.

Mangrove : écosystème de marais maritime.

NHC (National Hurricane Center) : service américain de suivi de la formation et de l’évolution des ouragans.

Pare-battage : sorte de bouée gonflée d’air servant à amortir et à protéger la coque face à d’éventuels chocs sur un quai ou un autre bateau (on parle également de « défense »).

Portique : structure en inox à l’arrière du voilier permettant de supporter des panneaux solaires par exemple.

Sainte-Lucie (Saint Lucia en anglais) : état insulaire des Antilles situé entre, au sud, les îles de Saint-Vincent-et-les-Grenadines, au sud-est, la Barbade et au nord, la Martinique.

Sondeur : appareil servant à mesure la profondeur. de l’eau sous le bateau.

Taquet : pièce fixée au navire pour y amarrer les aussières (dites également amarres).

Trou à cyclone : baie particulièrement bien protégée dans laquelle se réfugient les bateaux en cas de menace de vents forts.

UTC (Universal Time Coordinated) : « Temps Universel Coordonné » en français. C’est l’heure de référence internationale.

 

Portrait 04 – Donald CROWHURST (1932-1969), un fou si solitaire

En 1969, le journal Sunday Times organise la première course autour du monde en solitaire et sans escale, la « Sunday Times Golden Globe Race ». Trois de ses concurrents ont marqué les esprits : Robin Knox-Johnston, le gagnant, Bernard Moitessier qui décide d’abandonner la course pour entamer un deuxième tour du monde consécutif (son livre « La longue route » raconte son périple) et enfin, Donald Crowhurst…

Donald Crowhurst, marié, 4 enfants, est un homme d’affaires anglais et un navigateur amateur. Il décide de participer à cette course afin de gagner le prix de 5.000 livres sterling offert au plus rapide et ainsi sauver son entreprise en difficulté.

Il est tellement sûr de lui qu’il hypothèque son entreprise et sa maison en échange du soutien financier de son principal sponsor, l’homme d’affaires Stanley Best, un marchand de caravanes. Il se place ainsi dans une situation financière dangereuse, risquant la faillite s’il perd la course car il a signé un contrat : s’il ne part pas ou s’il abandonne trop tôt, il devra racheter le bateau, ce qui signifie perdre tous ses biens en contrepartie… Pourtant, il n’est pas un marin confirmé mais plutôt un marin d’eau douce qui rêve de gloire et de richesses. Sa principale expérience de mer était liée à son travail : il créait et commercialisait alors un équipement de navigation. A part ça, peu d’heures passées sur les ponts de bateaux…

Grâce à son sponsor, il fait construire un bateau nommé « Teignmouth electron », un trimaran de 12 mètres. Au sommet du mât de celui-ci, il installe une bouée gonflable censée se déclencher en cas de chavirage permettant ainsi au trimaran de ne pas basculer à l’envers le temps qu’un système de pompes et de ballasts le redresse. Crowhurst espère ainsi promouvoir cet équipement et le commercialiser après la course.

Cependant, rien ne se déroule comme prévu…

Déjà, Crowhurst n’a encore jamais navigué sur un trimaran avant la livraison du sien quelques semaines seulement avant le départ de la grande course !

Les navigateurs souhaitant participer à la Sunday Times Golden doivent se qualifier en participant à une course préliminaire en Angleterre sur un parcours devant être réalisé en 2 jours. Crowhurst, lui, met 10 jours à l’effectuer mais le jury de la course le qualifie tout de même… D’ailleurs, avec son allure de gentil employé de bureau, il détonne au milieu des autres compétiteurs, marins qualifiés. Toutefois, il dégage en public une certaine assurance qui donne l’impression qu’il maîtrise ce qu’il fait.

Il part le 31 octobre 1968, le dernier jour prévu par le règlement de la course (les autres concurrents sont partis bien avant). C’est le chaos à bord. Dans la hâte du départ, une grosse partie de son avitaillement n’est pas embarquée. Il a manqué de temps dans la préparation de son bateau. Il part alors même que ses systèmes de sécurité ne sont pas finalisés. Il compte finir leur installation pendant la course ! Sa femme n’a pas osé lui demander d’abandonner, elle sait que trop d’argent et trop de fierté ont été investi. Elle le regrettera amèrement plus tard… La veille du départ, il la passe à pleurer. Il sait que son bateau n’est pas prêt. Il a peur mais il est poussé par son sponsor et la presse à qui son agent la vendu comme « le marin mystère ».

Dès le début de la course, il rencontre des problèmes avec ce bateau qu’il connaît mal. Il avance à la moitié de la vitesse prévue, seulement 60 milles par jour. Puis, il s’aperçoit que son bateau prend l’eau. Il doit écoper. Dans les 40èmes rugissants, il sait qu’il ne résistera pas. Lucide, il se donne lui-même seulement 50% de chances de survie s’il arrive à finaliser son équipement de sécurité avant d’entrer dans l’Océan Pacifique Sud.

Il se trouve face à un choix cornélien : s’il abandonne, c’est la faillite et la honte, s’il continue c’est une mort probable.

Alors qu’il est encore dans l’océan Atlantique, il élabore un plan qui lui permettrait de garder la face. Au lieu de continuer la route vers l’océan Pacifique, il va errer dans l’Atlantique Sud pendant plusieurs mois, le temps que les autres concurrents entament la dernière partie de la course et remontent l’Atlantique en direction de l’Angleterre et là, il rejoindra discrètement le peloton, à distance respectueuse des trois premiers. Il compte falsifier son livre de bord et envoyer par radio de fausses positions. Il sait que s’il ne finit pas dans les tout premiers, ses livres de bord ne feront pas l’objet d’un examen minutieux.

Depuis son départ, il est resté volontairement flou lors des transmissions radio de sa position. A partir du 6 décembre, il commence à mettre en exécution son plan en envoyant des positions vagues puis complètement fausses. Il rédige même un journal de bord destiné à « justifier » ses fausses positions.

Entre les 6 et 8 mars 1969, il s’arrête près du Río Salado en Argentine pour réparer son flotteur tribord endommagé. Cet arrêt seul, s’il avait été connu du jury, aurait entraîné sa disqualification.

Il reste la majeure partie du temps dans le silence radio le plus complet. Lorsqu’il doit communiquer, il invente des excuses expliquant son silence comme des problèmes de générateur…

Tout fonctionne comme prévu. Les trois premiers navigateurs solitaires, Knox-Johnston, Moitessier et Tetley, passent le Cap Horn et Crowhurst se cache derrière eux.

Le 9 avril 1969, il annonce de nouveau une fausse position et à partir du 4 mai, il « reprend » la course et recommence à donner sa position réelle.

Mais c’est le coup de tonnerre lorsque Bernard Moitessier, après 7 mois de navigation et à à peine 6 semaines de l’arrivée, décide d’arrêter la course pour continuer sa route et faire un second tour du monde ! Crowhurst se retrouve, malgré lui, sous le feu des projecteurs… Ce rebondissement rend l’évènement encore plus excitant pour le public.

Le premier à franchir la ligne d’arrivée est Robin Knox-Johnston, le 22 avril 1969 mais le public reste fasciné par le développement de la course. En effet, Nigel Tetley et Donald Crowhurst, peuvent encore tous les deux remporter le prix du marin le plus rapide et empocher la somme de 5.000 livres.

Seul Francis Chichester, premier navigateur à effectuer un tour du monde d’ouest en est en solitaire et organisateur de la course, exprime publiquement ses doutes sur la progression de Donald Crowhurst.

Tetley, se croyant réellement menacé, pousse son trimaran Piver de 12 mètres, à son maximum et celui-ci se disloque le 21 mai…

 Toute l’attention du public se porte alors sur Crowhurst, qui compte « officiellement » deux mois d’avance sur le temps de passage de Knox-Johnston. Crowhurst est désespéré. Il ne peut pas se permettre d’être le plus rapide à accomplir le tour du monde car il sait que son journal de bord ne résistera pas à l’examen attentif auquel il sera soumis et sa tromperie sera mis à jour…

Le 29 juin, il envoie sa dernière transmission radio et ensuite c’est un nouveau silence radio… Son trimaran « Teignmouth Electron » sera trouvé à la dérive le 10 juillet par le paquebot Picardie. Crowhurst n’est pas à bord. Il a disparu…

La lecture de ses journaux de bord met en évidence la personnalité d’un homme qui a sombré dans une douce folie. Son stratagème est grossier : il a enregistré des distances parcourues irréalistes qui auraient, sans aucun doute, révélé la supercherie… D’un autre côté, il a pris le temps d’étayer ces positions fictives par de fausses indications et de fausses observations célestes qui ont dû lui prendre un temps considérable à établir en raison du temps de recherches nécessaires… Ses écrits des dernières semaines, notamment, une fois qu’il a réalisé qu’il risquait de remporter le prix, mette à jour une folie grandissante. Il agrémente ses journaux de bord de poèmes, de citations et de pensées diverses. Il cite à plusieurs reprises le nombre 243 : il prévoit de terminer son tour du monde en 243 jours, il a enregistré une distance parcourue en 24 heures de 243 milles marins (ce qui aurait été le record de la course) et il a probablement mis fin à ses jours le 243e jour de son voyage, le 1er juillet, date de sa dernière entrée dans les journaux de bord. Il y inscrit « C’est fini, c’est fini. C’est la fin de mon jeu. La vérité a éclaté ».

On ne peut que supposer qu’il s’est jeté par dessus bord car rien dans l’état du trimaran ne laisse supposé qu’il y ait été précipité par accident…

Robin Knox-Johnston, le gagnant de la course, remet par la suite ses gains à la veuve de Donald Crowhurst.

Un magnifique film raconte son périple sur la base de documentaires filmés à l’époque, l’occasion également de voir quelques images de Bernard Moitessier : https://www.youtube.com/watch?v=IY2rQh8UraY.

L’épave de son catamaran « Teignmouth Electron » repose sur l’atoll « Cayman Brac » des îles Caïmans.

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Portrait 3 – Alain BOMBARD, le naufragé volontaire (1924-2005)

Alain BOMBARD est à la fois médecin, biologiste, aventurier, écologiste, secrétaire d’Etat, député européen, écrivain, violoncelliste… Il est né en 1924 et décédé à l’âge de 80 ans. Il a vécu à fond sa vie et ses passions.

Lors de son internat de médecine à Boulogne-sur-Mer, il voit régulièrement des  naufragés moribonds arriver à l’hôpital. Il veut faire évoluer les choses et décide de se spécialiser dans la survie en mer. Il devient chercheur au Musée océanographique de Monaco.

Dans ce documentaire de l’INA, Alain BOMBARD raconte ce qui lui l’a poussé à réaliser cette odyssée hors du commun : http://www.ina.fr/video/5168841001.

Il s’intéresse tout d’abord à la résistance à la faim, la soif et à la fatigue. Pour cela, en 1951, il traverse la Manche à la nage enduit de graisse pour éviter l’hypothermie. Ensuite, il étudie de plus près les canots gonflables. A l’institut océanographique de Monaco, il analyse la composition de l’eau de mer, le plancton et le potentiel hydrique de la chair de poisson ainsi que le comportement des naufragés. Il sait qu’un homme peut survivre une trentaine de jours sans manger si c’est un jeun volontaire mais à peine dix jours sans boire. Et d’après Bombard, pour étancher sa soif, on dispose de trois sources possibles : l’eau de mer, le jus de poisson et l’eau de pluie. Dans son esprit, il est donc possible de survivre longtemps avec un équipement minimum pour boire et s’alimenter : un hameçon et un morceau de toile qui sert à la fois à récolter l’eau de pluie et à filtrer l’eau de mer pour récolter du plancton.

Il est persuadé que les gens meurent plus de désespoir que de manque de nourriture et d’eau dans des circonstances extrêmes. Il fonde cette théorie sur des naufrages tels que celui du Titanic où certaines personnes sont mortes ou sont devenues folles alors qu’elles avaient trouvé refuge dans les canots de sauvetage, au contraire des enfants qui se trouvaient avec eux car ceux-ci étaient moins sujets au désespoir et à la panique.

Il décide alors de prouver qu’il est possible à un naufragé de survivre sans autres ressources que celles de la mer. En 1952, à l’âge de 28 ans, il se lance dans une aventure complétement folle en décidant de faire l’expérience sur lui-même !

Il commence par embarquer avec un acolyte volontaire nommé Jack Palmer, un marin anglais de rencontre, à bord d’un petit canot pneumatique de 4,65 mètres de long sur 1,90 mètres de large doté d’une voile et baptisé « L’Hérétique ». Ils quittent Monaco sans eau douce, ni vivres, en emportant simplement un sextant, un filet à plancton et du matériel de pêche. Alain Bombard est persuadé, à l’inverse des croyances de l’époque, qu’il est possible de consommer de l’eau de mer pour survivre « à condition de ne pas attendre d’être déshydraté pour en boire ». Après 18 jours d’errance, ils touchent terre aux îles Baléares et ils se font remorquer à Tanger. Ses détracteurs s’en donnent à cœur joie : comme ils n’ont pêché que deux mérous, un cargo a dû se dérouter pour fournir un ravitaillement d’urgence aux deux marins écœurés du plancton. Jack Palmer, le seul à savoir comment faire le point avec le sextant, abandonne la partie mais Alain Bombard, lui, décide de continuer l’aventure.

Il repart donc seul, cette fois-ci, depuis Las Palmas aux îles Canaries le 22 octobre 1952 pour traverser l’Atlantique. Il n’emmène de nouveau ni vivres, ni eau douce avec lui… Au cours de cette aventure, il éprouve la peur de mourir. Il rédige même son testament en cours de route le 6 décembre 1952. Il subit une mer déchaînée qui remplit régulièrement son frêle esquif ce qui l’oblige à écoper sans arrêt avec les moyens du bord : sa chaussure ou son chapeau. Par chance, il croise un cargo, l' »Arakaka » dont le capitaine va lui offrir un repas frugal qu’il ne supportera pas (« un œuf sur le plat, un très petit morceau de foie de veau, une cuillerée de choux et deux ou trois fruits ») et surtout lui corriger une erreur de navigation de 600 milles nautiques. Malgré toutes les difficultés qu’il rencontre, il refuse d’abandonner. Les dernières semaines sont très dures. Il finit par toucher terre à la Barbade le 23 décembre 1952, après 113 jours en mer, dont 65 de solitude et d’enfer dans l’Océan Atlantique et après avoir parcouru 6.000 kilomètres. Il est exténué. Il a perdu 25 kilos. Il doit même être hospitalisé à son arrivée. Il avoue même avoir été tenté de « s’assoupir à jamais », mais il a prouvé sa théorie : on peut survivre sans rien, lors d’un naufrage.

Pendant sa traversée de l’Atlantique, il note scrupuleusement toutes ses observations, il mesure ce qu’il avale, ses sensations, son état général, sa pression artérielle et son rythme cardiaque. Sans oublier les effets secondaires de la consommation d’eau de mer, considérée à l’époque comme le pire des poisons, mais source précieuse de sodium. Il filtre le plancton, riche en vitamine C, pour combattre le scorbut. Il s’alimente de sa pêche, récupère l’eau de pluie quand la météo lui est favorable (il attendra tout de même 3 semaines qu’il pleuve), il boit l’eau « douce » obtenue en pressant la chair de ses prises. Et il consomme l’eau de mer, par petites quantités (brisant ainsi le tabou de l’époque).

Il relate en 1953 cette expérience unique dans un livre intitulé « Naufragé volontaire » qui sera traduit en quinze langues, obtenant ainsi une notoriété internationale. Toutefois, soupçonné de tricherie et sa thèse concernant l’ingestion d’eau de mer étant contestée, il devra attendre 1976 pour que son exploit soit officiellement reconnu et que le canot « L’Hérétique » trouve une place au musée de la Marine.

Il apparaît que Bombard a été mal compris. Il n’a jamais soutenu que la survie de l’être humain est possible en buvant uniquement de l’eau de mer. Il explique simplement que l’ingestion d’eau de mer en petite quantité peut prolonger la survie si et seulement si elle est accompagnée d’eau douce : à défaut de pluie, les liquides présents dans le corps des poissons peut en faire office.

Les conseils qu’il prodigue dans son livre sont les suivants :

  • Manger en pêchant des poissons (fils de pêche) et en récoltant du plancton riche en vitamine C (filet).
  • Boire de l’eau de mer en petites quantités afin de retarder la déshydratation (maximum 1 litre par jour) tout en buvant de l’eau de pluie ou à défaut l’eau extraite de poissons pressés (sauf certains comme la raie dont le taux de salinité est trop élevé).
  • S’occuper durant la journée, se créer un emploi du temps, pour éviter l’ennui et donc le désespoir que cela entraîne
  • Se méfier des espadons ou des requins qui pourraient crever l’embarcation mais surtout du désespoir, le pire ennemi du naufragé !

On trouve dans ce livre une anecdote devenue célèbre sur le colmatage d’une légère fuite d’air dans un flotteur grâce à une colle biologique que les hommes seuls sont capables de produire !!!

A une époque où à peine 1 naufragé sur 1.000 était sauvé, sa démonstration permet de faire avancer les choses en matière de sauvetage. C’est la « victoire du mou contre le dur ». (les canots gonflables versus les chaloupes anciennes). Grâce à lui, le canot pneumatique de sauvetage, devient obligatoire sur tous les bateaux. De son vivant, son patronyme devient d’ailleurs un nom commun : le « Bombard » désignant un canot pneumatique de survie auto-gonflable et insubmersible. Son combat a un prix : il rate heureusement son suicide aux barbituriques en janvier 1963 et parvient à reprendre pied.

Tout le reste de sa vie sera consacrée à la protection de l’écologie et à la sauvegarde de la mer. Il poursuivra une belle carrière politique. Il sera également fait Gloire du sport. Pour en savoir plus sur lui : http://www.ina.fr/video/CPC78056451.

Art. 9 – Attaque à main armée !

(Tous les mots suivis d’un * sont expliqués dans le glossaire figurant au bas de l’article)

Cela fait quelques jours que je suis rentrée de Carriacou(*). Je profite de nouveau de l’eau claire de ma zone de mouillage préférée près du troisième trou à cyclone(*) bien à l’écart du mouillage principal de la baie du Marin, non loin du Club Med, en compagnie d’une dizaine d’autres bateaux.

Ce début d’après-midi, alors que je bricole à l’intérieur de mon bateau, j’entends quelqu’un m’interpeler depuis l’extérieur. Je sors la tête dehors et je reconnais André, un jobber(*) à qui j’ai eu affaire il y a quelques temps. J’avais bu un verre à bord de son bateau d’ailleurs à l’époque. Il souffrait de sa séparation d’avec son ex même si ça faisait quelques mois déjà et la discussion avait principalement portée sur ça. Je le connaissais donc un petit peu mais sans plus.

Il est à bord de son voilier en acier. L’ancre pend à l’avant comme s’il s’apprêtait à mouiller dans la zone, sauf qu’à l’allure vive à laquelle il se déplace, cela me semble difficile. Le moteur est lancé à plein régime et semble souffrir : une énorme fumée noire se dégage de l’échappement. Et son annexe traîne à l’arrière de son voilier tractée par son bout(*) comme un chien étranglé au bout de sa laisse.

M’apercevant, André me crie alors : « Regarde Diane ! C’est pas tous les jours que tu verras ça ! ». Interloquée, je le regarde debout dans le cockpit de mon bateau sans comprendre de quoi il me parle. Il contourne Nautigirl et soudain je le vois éperonner(*) le bateau juste devant le mien ! C’est le voilier d’Yves, mon pote, celui qui m’a accompagné jusqu’à Carriacou où nous avons fait notre carénage(*) ensemble. C’est un combat inégal ! L’agresseur a une coque en acier et l’agressé, Archangels, est un bateau en fibre.

Yves n’est pas à bord. Je l’ai vu s’éloigner un peu plus tôt en annexe. Je reste un court instant interloquée avant de bondir sur mon téléphone afin de le contacter. Je tombe sur sa messagerie qui semble prendre un temps infini avant de m’autoriser à lui laisser un message lui disant de rappliquer au plus vite. Mon second coup de téléphone est pour les gendarmes au 17. Je tente de répondre calmement aux questions de mon interlocutrice qui semble prendre un malin plaisir à enchaîner les questions que je juge inopportunes au lieu d’envoyer immédiatement les autorités. Pendue au téléphone, je suis la spectatrice impuissante des assauts répétés du monstre d’acier sur sa fragile proie.

André sait parfaitement ce qu’il fait visiblement car il vise les points stratégiques de la structure, au niveau des haubans(*) bâbord(*) et tribord(*), ainsi qu’à l’arrière. Il cherche à faire le plus de dégâts possibles espérant certainement faire démâter(*) le bateau et le couler. Il semble décidé et déterminé.

Je sais à quel point Yves tient à son bateau, tout comme je tiens au mien d’ailleurs, sauf qu’on ne parle pas du même budget et puis moi, j’ai une autre maison qui m’attend loin dans le Pacifique, lui il n’a que son voilier comme seule bien et seule habitation… Alors je tente d’agir comme j’aimerai qu’on agisse pour moi. Je saute sur ma petite annexe pour rejoindre le bord d’Archangels. Je me dis qu’avec une femme à bord de sa cible, André fléchira sans doute et hésitera avant de charger une nouvelle fois de peur de me blesser. Je me tiens maintenant debout sur la plage arrière et je tente d’apostropher André pour le raisonner. Sans succès…Ma stratégie n’est pas la bonne… Je vois l’avant de son bateau et son ancre menaçante se rapprocher de moi et je dois descendre au dernier moment de la plage arrière pour me protéger derrière la roue et éviter ainsi le nouvel impact. J’entends le bruit de la fibre qui craque.

Capture d_écran 2017-10-24 à 13.46.30Le monstre d’acier érafle le flanc d’Archangels. Un instant, les deux coques sont l’une contre l’autre. Alors, sans réfléchir, je franchis l’espace séparant les deux bateaux pour me retrouver sur le pont de l’agresseur. J’ai dû regarder trop de films avec Bruce Willis… Je suis tellement certaine qu’André va reprendre l’attitude d’une personne saine d’esprit que je m’avance sans hésitation vers lui. Mon élan est très rapidement refroidi par le pistolet qu’il me braque dessus depuis son poste de pilotage, partiellement masqué par la capote. Je ne cherche pas à comprendre, je ne fais qu’obéir à son ordre sec « Sors de mon bateau ! ». Ni une, ni deux, je fais marche arrière et je ressaute sur le pont d’Archangels. Je suis abasourdie. C’est la première fois que j’ai le canon d’une arme braqué sur moi… Et croyez-moi, on ne voit que la bouche du canon, noire et ronde, rien d’autre… Je ne saurais même pas dire s’il est gaucher ou droitier, ou comment il le tenait, je n’ai vu que ce tube épais et noir pointé sur moi, c’est tout. Je décide alors de me mettre en sécurité. Après tout, je ne suis pas John McClane. Lui, il aurait pété le nez du gars et ça aurait été réglé en deux-deux… Mais les films et la vraie vie sont deux réalités différentes….

Je remonte dans mon annexe et rejoins d’autres amis sur leur voilier tout proche de la scène. Je les entends crier à André d’arrêter, que la police est en route, qu’il pense à ses enfants ! Mais rien n’y fait, il continue le carnage. Tout le monde est horrifié.

André menace dans la foulée un couple de danois sur leur catamaran ancré tout prêt d’Archangels. Ils le gênent dans ses manœuvres pour tourner autour de sa cible et ça l’agace. Mais eux aussi ont une arme à bord… en plastique… mais cela André n’en sait rien… Il baisse la tête et s’éloigne. Les danois ont alors la présence d’esprit de filmer le reste de la scène.

Capture d_écran 2017-10-24 à 13.47.12Au total, le monstre d’acier éperonne 9 fois Archangels. Et pas une fois les yeux que celui-ci a à l’avant de sa coque n’auront cillé, tout comme ceux d’André qui quitte enfin la scène sans avoir réussi à couler sa victime mais avec la satisfaction de l’avoir suffisamment massacré à son goût. Il sait que désormais Yves ne pourra plus s’en servir. Les dégâts sont trop importants. Les points névralgiques ont été touchés. Il faudra une fortune pour tout réparer et Yves n’a pas d’assurance. Celle d’André ne couvrira rien puisqu’il s’agit d’un acte volontaire de dégradation. Il a la sensation d’avoir gagné sa bataille.

Toute cette action n’aura pris qu’une grosse demi-heure… C’est fou ce que cela m’a paru long néanmoins. Tous les témoins de la scène attendent les gendarmes qui semblent retenu près du mouillage principal du Marin. Aux jumelles, nous voyons le bateau de l’agresseur ancré à la limite du chenal. L’annexe traîne toujours derrière. Les gendarmes sont non loin. Ils prennent leurs précautions avant d’approcher. Il est 15 heures.

Pendant ce temps, nous sommes deux à monter à bord d’Archangels pour contrôler qu’il ne coule pas. Nous inspectons brièvement l’intérieur, nous démarrons le moteur et nous mettons en marche les pompes de cale(*) au cas où.

Yves arrive enfin une quinzaine de minutes plus tard. Il ne peut que constater les dégâts. Il est choqué et reste silencieux. Nous le laissons seul à bord à sa demande. C’est à ce moment-là, me racontera-t-il plus tard qu’il lit les sms menaçants qu’André lui a envoyé avant, pendant et après l’assaut.

Nous voyons une vedette de la gendarmerie s’approcher de nous environ 2 heures après, vers 17 heures. Ils sont 8 à bord de l’embarcation. Un instant, nous croyons qu’ils vont s’arrêter et prendre nos dépositions mais non. Ils ne font que nous avertir qu’un médiateur est attendu pour raisonner André qui est toujours à bord de son bateau.

Yves nous rejoint à la tombée de la nuit sur le bateau de ses amis les plus proches avec lesquels je suis depuis le milieu de l’après-midi. Peu de temps après, nous voyons l’hélicoptère de la gendarmerie tourner au-dessus de la marina(*). Son puissant projecteur balaye la zone. Nous apprenons alors avec stupeur que André a réussi à quitter son bord malgré la surveillance des gendarmes ! Ceux-ci reviennent nous voir sur leur hors-bord vers 19h30. Yves, inquiet pour sa sécurité, la notre et celle de son bateau, leur demande s’il n’est pas important qu’il s’éloigne de la zone de recherche. Nous sommes tous persuadés que André n’aurait pas hésité à tirer sur Yves s’il avait été à bord. Sinon pourquoi venir armé ? Et nous pensons qu’il est susceptible de revenir finir le travail. Avec l’accord des gendarmes, Yves décide de quitter le mouillage vers 19h45. Ces derniers lui assurent qu’ils veilleront à sa sécurité pendant la manœuvre et lui donne le canal de VHF(*) sur lequel il peut les contacter si besoin.

Le moteur d’Archangels ronronne et nous le voyons, inquiets, s’éloigner vers le chenal principal. Nous ne sommes pas tranquilles de laisser partir Yves seul mais il préfère ne mettre en danger personne d’autre. Il n’a que son feu de mouillage(*) pour se signaler, tout autre instrument électrique étant hors d’état de fonctionner.

Ce qui suit m’a été raconté par Yves lui-même. Je retranscris ci-dessous ce qu’il a vécu seul à bord.

A peine entré dans le chenal(*), il aperçoit une annexe(*) qui le suit avec deux personnes à bord. L’une d’entre-elles porte une frontale qui éclaire un instant son coéquipier. Yves reconnaît André ! Cette fois-ci, il est accompagné et cherche à se rapprocher ! Visiblement, celui-ci devait être en planque à côté du mouillage pour l’avoir rejoint si vite ! Preuve en est qu’Yves a bien fait de se méfier.

Il prend peur et accélère le régime du moteur de son voilier pour prendre la fuite. En même temps, il se précipite à l’intérieur de son bateau pour pouvoir contacter la gendarmerie sur la VHF. Nous entendons ses appels mais pas la gendarmerie ! Elle ne répond pas !!! C’est nous, sur le bateau « New Moon » qui sommes tenu de les appeler par téléphone pour leur faire part de la poursuite en cours ! Ce qui est curieux toutefois c’est que André semble faire demi-tour au moment où Yves tente de contacter les gendarmes sur la VHF. Comme si celui-ci avait une VHF branchée sur le bon canal… En tous les cas, celui-ci s’éloigne et bientôt Yves, toujours en direction de la sortie du chenal voit l’hélicoptère, le bateau des douanes ainsi que celui de la gendarmerie arriver vers lui. Il tente de les informer du demi-tour opéré par André et d’orienter l’hélicoptère dans la direction prise par ce dernier sans grand succès, leur VHF semble ne pas fonctionner et les instructions criées à haute voix à peine entendues. Le temps que tout ce petit monde fasse demi-tour dans la bonne direction, André s’est à nouveau échappé !

Yves est nerveux. Il s’inquiète que André puisse le retrouver et il préfère trouver un refuge autre que celui qu’il avait indiqué aux gendarmes. Il parcourt alors près de 5 kilomètres, tous feux éteints pour s’abriter dans un lieu difficilement accessible en annexe. Il est tellement stressé toutefois qu’il ne s’autorise que 5 mètres de chaîne pour mouiller(*) ce qui lui permettrait de quitter les lieux très rapidement s’il était menacé, mais ce qui signifie également que le bateau peut à tout moment déraper.

Vers 22h30, il appelle la gendarmerie au téléphone pour savoir si André a été appréhendé. Il apprend alors par son interlocuteur que les recherches ont été abandonnées, ce qui accroit encore son stress ! Ce dernier lui demande sa position et Yves préfère lui donner une position bidon au cas où André écouterait.

La nuit s’écoule doucement. Vers 6h15, Yves ne tient plus et rappelle la gendarmerie pour avoir des nouvelles et des conseils sur la conduite à tenir pour cette nouvelle journée. Son interlocuteur l’informe que quelqu’un le rappellera vers 7h00. Il n’aura finalement de réponse de la gendarmerie que vers 8h00 qui lui annonce qu’André a été intercepté. Il peut enfin rentrer au mouillage nous rejoindre…

Il apprendra plus tard que non content de l’avoir harcelé et menacé par sms, André avait également grandement partagé ses intentions sur sa page Facebook annonçant quelques minutes avant le drame qu’il allait faire « le buzz » et quelques minutes après qu’il avait « défoncé le bateau de cet enculé ».

J’apprendrais que la cause de tout cela c’est que mon ami, Yves, venait de commencer une histoire avec l’ex-femme d’André (ils étaient en cours de séparation) et celui-ci, possessif et jaloux, a voulu se venger lorsqu’il l’a appris. Il a alors décidé de s’en prendre au bien le plus cher de mon ami. Son bateau. Son unique bien.

André a été jugé en comparution immédiate. Il a écopé de 18 mois de prison avec sursis avec une interdiction de détenir une arme pendant 5 ans… Peu de chance qu’il arrive à rembourser un jour les dégâts qu’il aura occasionné…

Pour visionner une partie de la scène capturée par le couple de Danois, c’est ici :

Sombre histoire dans laquelle il n’y a eu aucun gagnant…


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A très vite !


PS : Cette histoire raconte ce que j’ai vécu mais afin de respecter l’anonymat des personnes qui ont croisées ma route, j’utilise des prénoms d’emprunt – sauf autorisation expresse obtenue de leur part.


GLOSSAIRE :

Annexe : petite embarcation, à rame ou à moteur, permettant de faire les allers retours entre le port ou le rivage et le bateau en mouillage.

Bâbord : en bateau, on ne dit pas gauche, on dit « bâbord », c’est la gauche du bateau lorsque se situe à l’arrière et qu’on regarde vers l’avant.

Bout : (se prononce « boute ») cela désigne, de façon générale, un cordage sur le navire car le mot « cordage » n’est jamais utilisé par les navigateurs.

Carénage : lieu où l’on carène (nettoie) les coques des bateaux.

Carriacou : île du sud des Antilles faisant parti de l’Etat de Grenade. C’est l’île la plus septentrionale des îles de l’État de Grenade. La population est d’environ 8.000 habitants.

Chenal : c’est la voie d’accès à un port ou à une zone de mouillage dans lequel un navire disposera de la plus grande profondeur d’eau sous la quille, lui permettant de progresser en toute sécurité.

Démâter : abattre ou rompre violemment un mât.

Éperonner : percuter à l’aide de l’éperon dans le but d’endommager, voire de le couler, en parlant d’un navire.

Feu de mouillage : feu diffusant une lumière blanche sur 360° et être disposé à l’endroit le plus visible d’un navire. La nuit, il doit être allumé lorsque le bateau est au mouillage.

Haubans : câbles qui soutiennent latéralement le mât, reliant les hauts du mât au pont du bateau.

Jobber : quelqu’un qui vit de divers petits travaux qu’il réalise à son compte.

Marina : complexe résidentiel incluant un port de plaisance utilisé en partie par les résidents.

Mouiller / Mouillage : terme désignant plusieurs choses selon le contexte. Le bateau est au mouillage, lorsqu’il est accroché à son ancre, ou à son corps mort, il ne navigue pas. Le mouillage c’est aussi la chaîne et l’ancre. Un bon mouillage est un lieu où l’on peut s’arrêter en sécurité.

Pompe de cale : c’est une pompe qui permet d’évacuer l’eau de l’intérieur du bateau depuis l’un des points les plus bas de la coque.

Tribord : en bateau, on ne dit pas droite, on dit « tribord », c’est la droite du bateau lorsque se situe à l’arrière et qu’on regarde vers l’avant.

Trou à cyclone : baie particulièrement bien protégée dans laquelle se réfugient les bateaux en cas de menace de vents forts.

VHF : radio à très haute fréquence (bande de fréquences comprises entre 30 MHz et 300 MHz).

Débaptiser son bateau porte-t-il malheur ?

D’après la superstition maritime, on ne doit pas changer le nom d’un bateau sans respecter un cérémonial bien précis car sinon ça porte malheur en attirant les foudres du dieu Neptune !

Alors, si vraiment un bateau doit être rebaptisé, il faut respecter une certaine cérémonie en coupant le « Macoui ». Le Macoui est attaché au nom du bateau. C’est le sillage qui fait penser à un long serpent suivant en permanence l’embarcation. Chaque bateau a un et un seul Macoui qu’il obtient lors de son premier baptême. Du coup, si on le rebaptise, il aura un deuxième Macoui qui entrera en conflit avec le premier, chacun cherchant à prendre le contrôle sur l’autre et à cause de cela, il arrivera de nombreux ennuis au bateau. C’est pour ça qu’on dit qu’il faut tuer le Macoui attaché à l’ancien nom avant de lui donner le nouveau nom.

Tout d’abord, il faut faire disparaitre toute trace de l’ancien nom à bord. On efface donc l’ancien nom sur le tableau arrière. On se débarrasse de tous les objets marqués de l’ancien nom sans rien oublier : bouée de sauvetage ou gilets marqués au feutre indélébile, vieux journal de bord, cartes marines marquées, vieilles factures etc…

Ensuite la procédure nécessite l’intervention d’un bateau ami. Voici la manière de procéder :

  1. Verser un verre de rhum ou du meilleur alcool à bord à l’arrière du bateau dans le sillage pour saouler le Macoui.
  2. Le bateau ami doit couper le sillage du bateau par 3 fois, le plus près possible du tableau arrière car c’est là où se trouve la tête du serpent.
  3. Le Macoui déteste les bruits forts. A défaut de pouvoir tirer un coup de canon ou un coup de feu (un peu compliqué de nos jours, avouons-le), il faut donc sonner un grand coup de corne de brume à chaque fois que le sillage est coupé par le bateau ami. Ainsi, le Macoui attaché au premier nom du bateau va mourir et se détacher.
  4. On peut alors rebaptiser le bateau en prononçant son nom à haute voix et on verse une rasade d’alcool au nouveau Macoui.
  5. Il ne faut pas oublier de remercier Neptune, qui a présidé la cérémonie, en versant dans la mer, côté tribord cette fois-ci, une bonne rasade d’alcool.

Certaines variantes exigent que la marraine du bateau soit présente durant toute la cérémonie, qu’elle prononce les paroles suivantes : « Je te baptise (nom du bateau) et te souhaite bonne navigation » et qu’elle casse ensuite du premier coup la bouteille sur l’étrave ou l’ancre du bateau. D’autres imposent que le breuvage soit exclusivement du champagne.

Bref, à vous de faire un peu votre sauce tant que vous faites attention à ne garder qu’un seul Macoui et à satisfaire Neptune. Il est également de bon ton d’inviter l’assistance à boire le verre de l’amitié et grignoter un morceau…

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