En 1969, le journal Sunday Times organise la première course autour du monde en solitaire et sans escale, la « Sunday Times Golden Globe Race ». Trois de ses concurrents ont marqué les esprits : Robin Knox-Johnston, le gagnant, Bernard Moitessier qui décide d’abandonner la course pour entamer un deuxième tour du monde consécutif (son livre « La longue route » raconte son périple) et enfin, Donald Crowhurst…
Donald Crowhurst, marié, 4 enfants, est un homme d’affaires anglais et un navigateur amateur. Il décide de participer à cette course afin de gagner le prix de 5.000 livres sterling offert au plus rapide et ainsi sauver son entreprise en difficulté.
Il est tellement sûr de lui qu’il hypothèque son entreprise et sa maison en échange du soutien financier de son principal sponsor, l’homme d’affaires Stanley Best, un marchand de caravanes. Il se place ainsi dans une situation financière dangereuse, risquant la faillite s’il perd la course car il a signé un contrat : s’il ne part pas ou s’il abandonne trop tôt, il devra racheter le bateau, ce qui signifie perdre tous ses biens en contrepartie… Pourtant, il n’est pas un marin confirmé mais plutôt un marin d’eau douce qui rêve de gloire et de richesses. Sa principale expérience de mer était liée à son travail : il créait et commercialisait alors un équipement de navigation. A part ça, peu d’heures passées sur les ponts de bateaux…
Grâce à son sponsor, il fait construire un bateau nommé « Teignmouth electron », un trimaran de 12 mètres. Au sommet du mât de celui-ci, il installe une bouée gonflable censée se déclencher en cas de chavirage permettant ainsi au trimaran de ne pas basculer à l’envers le temps qu’un système de pompes et de ballasts le redresse. Crowhurst espère ainsi promouvoir cet équipement et le commercialiser après la course.
Cependant, rien ne se déroule comme prévu…
Déjà, Crowhurst n’a encore jamais navigué sur un trimaran avant la livraison du sien quelques semaines seulement avant le départ de la grande course !
Les navigateurs souhaitant participer à la Sunday Times Golden doivent se qualifier en participant à une course préliminaire en Angleterre sur un parcours devant être réalisé en 2 jours. Crowhurst, lui, met 10 jours à l’effectuer mais le jury de la course le qualifie tout de même… D’ailleurs, avec son allure de gentil employé de bureau, il détonne au milieu des autres compétiteurs, marins qualifiés. Toutefois, il dégage en public une certaine assurance qui donne l’impression qu’il maîtrise ce qu’il fait.
Il part le 31 octobre 1968, le dernier jour prévu par le règlement de la course (les autres concurrents sont partis bien avant). C’est le chaos à bord. Dans la hâte du départ, une grosse partie de son avitaillement n’est pas embarquée. Il a manqué de temps dans la préparation de son bateau. Il part alors même que ses systèmes de sécurité ne sont pas finalisés. Il compte finir leur installation pendant la course ! Sa femme n’a pas osé lui demander d’abandonner, elle sait que trop d’argent et trop de fierté ont été investi. Elle le regrettera amèrement plus tard… La veille du départ, il la passe à pleurer. Il sait que son bateau n’est pas prêt. Il a peur mais il est poussé par son sponsor et la presse à qui son agent la vendu comme « le marin mystère ».
Dès le début de la course, il rencontre des problèmes avec ce bateau qu’il connaît mal. Il avance à la moitié de la vitesse prévue, seulement 60 milles par jour. Puis, il s’aperçoit que son bateau prend l’eau. Il doit écoper. Dans les 40èmes rugissants, il sait qu’il ne résistera pas. Lucide, il se donne lui-même seulement 50% de chances de survie s’il arrive à finaliser son équipement de sécurité avant d’entrer dans l’Océan Pacifique Sud.
Il se trouve face à un choix cornélien : s’il abandonne, c’est la faillite et la honte, s’il continue c’est une mort probable.
Alors qu’il est encore dans l’océan Atlantique, il élabore un plan qui lui permettrait de garder la face. Au lieu de continuer la route vers l’océan Pacifique, il va errer dans l’Atlantique Sud pendant plusieurs mois, le temps que les autres concurrents entament la dernière partie de la course et remontent l’Atlantique en direction de l’Angleterre et là, il rejoindra discrètement le peloton, à distance respectueuse des trois premiers. Il compte falsifier son livre de bord et envoyer par radio de fausses positions. Il sait que s’il ne finit pas dans les tout premiers, ses livres de bord ne feront pas l’objet d’un examen minutieux.
Depuis son départ, il est resté volontairement flou lors des transmissions radio de sa position. A partir du 6 décembre, il commence à mettre en exécution son plan en envoyant des positions vagues puis complètement fausses. Il rédige même un journal de bord destiné à « justifier » ses fausses positions.
Entre les 6 et 8 mars 1969, il s’arrête près du Río Salado en Argentine pour réparer son flotteur tribord endommagé. Cet arrêt seul, s’il avait été connu du jury, aurait entraîné sa disqualification.
Il reste la majeure partie du temps dans le silence radio le plus complet. Lorsqu’il doit communiquer, il invente des excuses expliquant son silence comme des problèmes de générateur…
Tout fonctionne comme prévu. Les trois premiers navigateurs solitaires, Knox-Johnston, Moitessier et Tetley, passent le Cap Horn et Crowhurst se cache derrière eux.
Le 9 avril 1969, il annonce de nouveau une fausse position et à partir du 4 mai, il « reprend » la course et recommence à donner sa position réelle.
Mais c’est le coup de tonnerre lorsque Bernard Moitessier, après 7 mois de navigation et à à peine 6 semaines de l’arrivée, décide d’arrêter la course pour continuer sa route et faire un second tour du monde ! Crowhurst se retrouve, malgré lui, sous le feu des projecteurs… Ce rebondissement rend l’évènement encore plus excitant pour le public.
Le premier à franchir la ligne d’arrivée est Robin Knox-Johnston, le 22 avril 1969 mais le public reste fasciné par le développement de la course. En effet, Nigel Tetley et Donald Crowhurst, peuvent encore tous les deux remporter le prix du marin le plus rapide et empocher la somme de 5.000 livres.
Seul Francis Chichester, premier navigateur à effectuer un tour du monde d’ouest en est en solitaire et organisateur de la course, exprime publiquement ses doutes sur la progression de Donald Crowhurst.
Tetley, se croyant réellement menacé, pousse son trimaran Piver de 12 mètres, à son maximum et celui-ci se disloque le 21 mai…
Toute l’attention du public se porte alors sur Crowhurst, qui compte « officiellement » deux mois d’avance sur le temps de passage de Knox-Johnston. Crowhurst est désespéré. Il ne peut pas se permettre d’être le plus rapide à accomplir le tour du monde car il sait que son journal de bord ne résistera pas à l’examen attentif auquel il sera soumis et sa tromperie sera mis à jour…
Le 29 juin, il envoie sa dernière transmission radio et ensuite c’est un nouveau silence radio… Son trimaran « Teignmouth Electron » sera trouvé à la dérive le 10 juillet par le paquebot Picardie. Crowhurst n’est pas à bord. Il a disparu…
La lecture de ses journaux de bord met en évidence la personnalité d’un homme qui a sombré dans une douce folie. Son stratagème est grossier : il a enregistré des distances parcourues irréalistes qui auraient, sans aucun doute, révélé la supercherie… D’un autre côté, il a pris le temps d’étayer ces positions fictives par de fausses indications et de fausses observations célestes qui ont dû lui prendre un temps considérable à établir en raison du temps de recherches nécessaires… Ses écrits des dernières semaines, notamment, une fois qu’il a réalisé qu’il risquait de remporter le prix, mette à jour une folie grandissante. Il agrémente ses journaux de bord de poèmes, de citations et de pensées diverses. Il cite à plusieurs reprises le nombre 243 : il prévoit de terminer son tour du monde en 243 jours, il a enregistré une distance parcourue en 24 heures de 243 milles marins (ce qui aurait été le record de la course) et il a probablement mis fin à ses jours le 243e jour de son voyage, le 1er juillet, date de sa dernière entrée dans les journaux de bord. Il y inscrit « C’est fini, c’est fini. C’est la fin de mon jeu. La vérité a éclaté ».
On ne peut que supposer qu’il s’est jeté par dessus bord car rien dans l’état du trimaran ne laisse supposé qu’il y ait été précipité par accident…
Robin Knox-Johnston, le gagnant de la course, remet par la suite ses gains à la veuve de Donald Crowhurst.
Un magnifique film raconte son périple sur la base de documentaires filmés à l’époque, l’occasion également de voir quelques images de Bernard Moitessier : https://www.youtube.com/watch?v=IY2rQh8UraY.
L’épave de son catamaran « Teignmouth Electron » repose sur l’atoll « Cayman Brac » des îles Caïmans.

Le monstre d’acier érafle le flanc d’Archangels. Un instant, les deux coques sont l’une contre l’autre. Alors, sans réfléchir, je franchis l’espace séparant les deux bateaux pour me retrouver sur le pont de l’agresseur. J’ai dû regarder trop de films avec Bruce Willis… Je suis tellement certaine qu’André va reprendre l’attitude d’une personne saine d’esprit que je m’avance sans hésitation vers lui. Mon élan est très rapidement refroidi par le pistolet qu’il me braque dessus depuis son poste de pilotage, partiellement masqué par la capote. Je ne cherche pas à comprendre, je ne fais qu’obéir à son ordre sec « Sors de mon bateau ! ». Ni une, ni deux, je fais marche arrière et je ressaute sur le pont d’Archangels. Je suis abasourdie. C’est la première fois que j’ai le canon d’une arme braqué sur moi… Et croyez-moi, on ne voit que la bouche du canon, noire et ronde, rien d’autre… Je ne saurais même pas dire s’il est gaucher ou droitier, ou comment il le tenait, je n’ai vu que ce tube épais et noir pointé sur moi, c’est tout. Je décide alors de me mettre en sécurité. Après tout, je ne suis pas John McClane. Lui, il aurait pété le nez du gars et ça aurait été réglé en deux-deux… Mais les films et la vraie vie sont deux réalités différentes….
Au total, le monstre d’acier éperonne 9 fois Archangels. Et pas une fois les yeux que celui-ci a à l’avant de sa coque n’auront cillé, tout comme ceux d’André qui quitte enfin la scène sans avoir réussi à couler sa victime mais avec la satisfaction de l’avoir suffisamment massacré à son goût. Il sait que désormais Yves ne pourra plus s’en servir. Les dégâts sont trop importants. Les points névralgiques ont été touchés. Il faudra une fortune pour tout réparer et Yves n’a pas d’assurance. Celle d’André ne couvrira rien puisqu’il s’agit d’un acte volontaire de dégradation. Il a la sensation d’avoir gagné sa bataille.
















En attendant que le ponçage de la coque commence, je me charge de démonter l’hélice afin de pouvoir rendre au bronze son brillant d’origine. J’apprends à l’occasion à me servir d’un démonte-hélice que me prête le chantier car, contrairement à ce que je croyais, ça ne se démonte pas aussi facilement. Une fois les différents éléments démontés, un petit bain dans du Corobrill(*) fait des miracles : j’ai à peine à gratter pour faire disparaître toute trace d’organisme vivant. J’en passe aussi sur l’arbre de l’hélice avec un gros pinceau. Bientôt l’ensemble retrouve presque son brillant et son aspect lisse d’origine.
J’en profite pour démonter la bague hydrolube(*). Je sais qu’il en existe différentes sortes. La mienne est une sorte de petit tube creux en caoutchouc qui est inséré dans la chaise d’arbre(*) assurant ainsi le centrage de l’arbre d’hélice. Elle pourrait encore faire l’affaire mais tant qu’à faire, autant en profiter pour en mettre une neuve ! Je cours au magasin tout proche pour en acheter une nouvelle mais j’ai une mauvaise surprise. Celui-ci est minuscule. Ils ont quelques articles en stock mais rien pour moi. Professionnels, ils tentent de contacter le magasin de l’île la plus proche, Grenade(*) mais sans succès… Je tente ma chance en appelant un magasin de Martinique. Ils ont ce qu’il faut mais ils ne peuvent pas le faire livrer… Je ne me laisse pas démonter. Je poste aussitôt un message sur une page Facebook qui rassemble toute une communauté de martiniquais « JAH Familia ». J’y explique que je recherche quelqu’un qui pourrait me descendre la pièce en question vers Carriacou. Rapidement, j’ai une réponse d’une boite de charter, Piwi Croisières. Ils sont prêts à me descendre la pièce à Union(*) dans quelques jours. C’est super gentil ça ! Parfait, je n’ai plus qu’à attendre la livraison !!!
Certains marins refusent catégoriquement de partir un vendredi mais lorsqu’on les interroge, ils avouent volontiers ne pas savoir pourquoi on dit que ça porte malheur…
(Tous les mots suivis d’un * sont expliqués dans le glossaire figurant au bas de l’article)
J’entre à peine dans le canal quand soudain je vois deux énormes têtes noires et toutes rondes jaillir de l’eau à quelques dizaines de mètres du bateau. Je ne sais pas ce que c’est mais leur route est à 90° de la mienne ! Nous sommes en droite ligne de collision ! Ce ne sont pas des dauphins, leur tête est énorme !!! Ça ne peut être que des orques dans mon esprit… C’est plus grand qu’un dauphin, plus petit qu’une baleine et c’est tout noir. Des orques, hein ? Quoi d’autre ? Le cœur battant la chamade, je décroche mon pilote et j’abats(*) à fond pour les éviter tout en scrutant attentivement la surface de l’eau… Je ne les verrais jamais réapparaître. Les animaux ont sondé dans les profondeurs et moi j’en suis quitte pour une bonne petite trouille !
Je me suis imaginée un instant coulée à quelques milles seulement de mon point de départ ! Ça aurait été ballot tout de même lors de ma première navigation !!! J’apprendrais plus tard que ce sont des globicéphales qui peuvent mesurer de 5 à 6 mètres, rien à voir avec une orque qui peut atteindre 10 mètres !





